Le fer fixe l’oxygène dans le globule rouge et le transporte des poumons vers les muscles. Les règles et le sport augmentent les pertes. Très souvent, votre alimentation n’en contient pas assez. La carence vous guette, la contre-performance aussi ! Explications et prévention.
En 2008, un chercheur du nom d’ISRAEL a chiffré la carence en fer dans un groupe de militaires. Au sein des combattants de sexe masculin, ce problème était retrouvé chez 5 % d’entre eux. Parmi les combattantes, ce souci atteignait 30 % de l’effectif. Les femmes de la même unité travaillant dans les bureaux et bénéficiant d’une alimentation comparable manquaient de fer dans 27 % des cas. Être une femme augmente nettement le risque de carence en fer… et le sport aggrave la situation ! En moyenne, les autres études évaluent à 20 % la proportion de femmes concernées.
Le fer, pour quoi faire ?
Le fer est indispensable à votre santé et votre performance. Il constitue un élément central de l’hémoglobine. Cette dernière est contenue dans les globules rouges et lui donne sa couleur. C’est le fer qui capte l’oxygène lorsque le sang traverse les poumons. Il véhicule ce gaz précieux jusqu’aux muscles. Arrivé à destination, il largue sa cargaison qui permet alors la combustion des substances énergétiques et la contraction musculaire.
Si votre carence en fer est marquée, elle provoque un manque de globules rouges. Votre performance est nettement affectée. Pour essayer de compenser, votre respiration s’accélère et votre cœur bat plus vite. Vous vous épuisez plus rapidement lors des épreuves de longue durée : votre endurance diminue !
À fréquence cardiaque maximum, vous transportez moins d’oxygène : votre puissance, la fameuse VO2 max, est réduite. Dans le muscle, on trouve une sœur jumelle de l’hémoglobine : la myoglobine. Cette dernière, contient aussi beaucoup de fer qui fixe un peu d’oxygène. Cette petite réserve locale permet de débuter la contraction avant que l’ouverture des vaisseaux sanguins n’apportent le complément nécessaire.
Au sein de certaines protéines, le fer agit aussi comme catalyseur de réactions chimiques. On dit qu’il est un « cofacteur enzymatique ». Il intervient tout particulièrement dans la combustion des réserves énergétiques. C’est pourquoi, selon certains chercheurs, le manque de fer serait à l’origine de fatigue et de contre-performance bien avant que ne survienne une anémie.
Le fer participe aussi au fonctionnement cellulaire des globules blancs impliqués dans la lutte contre les microbes. Dans ce contexte, vous comprenez pourquoi une insuffisance en fer favoriserait les infections.
Plus de perte de fer chez les femmes
L’organisme élimine un peu de fer chaque jour dans les urines, les selles, la sueur et parfois les saignements. Chez vous, Mesdames, à cause des règles, les pertes moyennes sont deux fois plus élevées. Voilà qui explique que vous soyez, dans l’étude d’ISRAEL, 6 fois plus souvent que les hommes, victimes de carence.
Attention ! Ce n’est pas une raison pour encourager la classique « aménorrhée des sportives ». Elle survient quand l’athlète cumule longtemps dépense énergétique très élevée et alimentation nettement insuffisante. Dans ces conditions, le corps est amaigri et affaibli. Comme pour s’économiser, il place au repos la fonction de reproduction, les règles disparaissent et la production hormonale sexuelle s’arrête. La jeune femme hyperactive se retrouve en « ménopause précoce » ; ses os deviennent fragiles et son risque de maladie cardiaque augmente.
Plus de perte chez les sportives
Le sport accroît aussi les pertes de fer.
Quand vous pédalez, vos talons et les coussinets graisseux de vos plantes du pied sont écrasés. Ils sont traversés par de nombreux vaisseaux sanguins. Les globules rouges présents éclatent et libèrent leurs hémoglobines. Le fer est libéré dans le sang et passe dans les urines. Vos articulations fléchissent et vos muscles tirent dans l’autre sens. Lorsque ce geste se répète, les membranes musculaires sont victimes de micro-déchirures. La myoglobine et le fer quittent le muscle et gagnent le sang. Le précieux métal est éliminé par voie urinaire.
Les études montrent que les cyclistes, les nageurs et les rameurs ont moins de réserve de fer que les sédentaires… mais plus que les coureurs !
Les globules rouges ont pour mission d’apporter l’oxygène au cœur de la cellule, au plus près des enzymes chargés de la combustion. Pour cela, ils sont dans l’obligation de se faufiler dans les capillaires, de tous petits vaisseau fins comme des cheveux. Plus gros que le diamètre du tuyau, ils doivent se déformer pour passer.
À l’effort, le débit sanguin augmente considérablement dans les muscles en action. Sous la contrainte, certains globules rouges se déchirent. Encore une fois, le fer contenu se répand dans le sang et passe en partie dans les urines. Ce phénomène est plus fréquent quand les membranes du globule rouge sont raides et qu’il a été produit depuis de nombreuses semaines. Tout se passe comme si l’exercice réduisait la durée de vie des globules rouges, imposait un rythme soutenu de production et obligeait à disposer d’un surcroît de matière première.
Quand vous faites un effort, la majorité de flux sanguin s’oriente vers vos muscles. Il n’en reste que très peu pour le tube digestif et la paroi de la vessie. Ces organes souffrent du manque d’oxygénation et sont secoués. De petites zones s’abîment et se mettent à saigner.
Diversifiez votre entraînement
Pour éviter la carence, il est essentiel d’améliorer votre alimentation mais il est aussi opportun d’ajuster vos conditions d’entraînement.
Puisque les secousses du tube digestif et l’impact des talons sont délétères, il est conseillé de diversifier les pratiques et de réduire la course à pied. On parle de « séances croisées ».
L’aquabiking, la natation et le cardiotraining sur appareils devraient s’intégrer à votre programme.
L’insuffisance d’oxygénation de l’intestin provoque des micro-lésions à l’origine de petits points d’hémorragie. Vous le savez, ce phénomène s’aggrave à intensité élevée pour privilégier l’apport de sang au sein des masses musculaires en action.
N’abusez pas des séances dures.
De surcroît, pédaler à cette vitesse est sans intérêt psychomoteur.
Vous n’améliorez pas votre geste spécifique.
À intensité élevée, privilégiez l’elliptique, le rameur ou la natation. En plus de ménager vos globules, l’utilisation simultanée des bras et des jambes augmente la demande en oxygène et accroît le travail du cœur, c’est idéal pour progresser !
Pensez à alterner avec de grandes balades à vélo. Ces dernières ménagent votre stock de fer mais sont aussi à l’origine de progrès physiologiques. Elles apprennent à votre corps à vider plus profondément les réserves de « sucre musculaire » et à brûler plus de graisse.
Globalement, le surentraînement est source d’irritation du tube digestif et d’accélération du transit ; il perturbe l’absorption du fer. La prévention de sa carence passe par une charge de travail bien dosée et un « entraînement varié et croisé ».
Densifiez votre alimentation
Notre alimentation moderne manque de vitamines, de minéraux et d’oligoéléments. L’agriculture et l’élevage intensifs ont érodé la « densité nutritionnelle » de notre ration quotidienne.
Ainsi, une analyse du contenu moyen de nos repas montre qu’une femme devrait ingérer environ 3 300 kilocalories pour bénéficier d’un apport en fer correspondant à ses besoins. C’est beaucoup trop pour garder la ligne… à moins de faire 2h30 de sport par jour !
Une autre étude indique que 90 % des femmes n’ingèrent pas suffisamment de fer ! De fait, il vous est indispensable de choisir des aliments riches en fer aisément absorbable et de limiter ceux qui inhibent son assimilation.
Privilégiez le fer d’origine animale
Le fer d’origine animale passe facilement la barrière digestive. 25 % de cet apport gagne la circulation sanguine. En effet, dans sa « forme biologique », il est aisément reconnu par les cellules de l’intestin, il s’y fixe facilement grâce à sa petite armature de carbone appelée hème comme « hémoglobine ».
On en déduit aisément la liste des aliments riches en fer bien absorbable : le boudin noir car il est constitué de sang, la viande rouge car, comme le muscle humain, elle contient beaucoup de « myoglobine », voisine de l’hémoglobine, le foie qui stocke le fer des animaux sous sa forme biologique. Le poisson, la volaille et la « viande rose » devenant blanche après cuisson contiennent aussi du fer entouré d’hème mais en quantité plus modérée.
Seuls 5 % du fer présent dans les aliments végétaux est absorbé. Sans carcasse en carbone, il est sous « forme métallique ». Il franchit difficilement les cellules intestinales. Il peut rouiller au contact des nombreuses substances oxydantes circulant dans le tube digestif. Ainsi dénaturé, il est encore moins bien assimilé et peut même irriter l’intestin.
On en trouve des quantités notables dans les légumes secs (lentilles, haricots blancs, flageolets, pois chiches, etc.), le germe de blé, les céréales complètes et les oléagineux (amandes, noisettes, noix de cajou), sans oublier le chocolat !
Afin de protéger le fer des agressions chimiques et faciliter son absorption, il est conseillé de l’ingérer accompagné de vitamine C antioxydante. Les agrumes et les fruits rouges sont les bienvenus.
Pièges et astuces alimentaires
Il existe quelques substances inhibant l’absorption du fer, surtout celui d’origine végétale !
Le café en retient 40 % dans le tube digestif et le thé 60 %. Il en est de même pour l’acide oxalique présent dans les épinards… cette molécule achève ainsi de détruire la réputation déjà usurpée de ce savoureux légume (voir l’encadré : « POPEYE S’EST TROMPE »).
Prudence dans l’interprétation des taux de fer des œufs et du lait. Bien qu’il s’agisse de fer animal, il est dépourvu de carcasse carbonée. De fait, ce fer est sans grand intérêt nutritionnel. À l’inverse le bon fer animal, le « fer héminique » étend ses bienfaits. Il stimule l’assimilation du « fer métallique » voisin.
Ainsi, un petit salé aux lentilles suivi d’une bonne salade de fruits constitue une minicure de fer ! Les acides gras omégas 3 s’intègrent aux membranes cellulaires et favorisent leur souplesse. Il limite la destruction des globules rouges quand ils se faufilent rapidement dans les petits capillaires.
Ainsi, pour réduire les pertes de fer, insistez sur l’huile de colza et de noix ainsi que sur les poissons gras : thon, saumon, hareng, maquereau, sardine, etc.
Une complémentation parfois
Si vous êtes une sportive fatiguée, si vos chronos sont moins bons ces derniers temps, si votre cœur semble battre plus vite, votre médecin du sport vous prescrira probablement une prise de sang à la recherche d’un manque de globules rouges et d’une carence en fer.
Après avoir cherché et éliminé d’autres causes d’anémie, il vous donnera sûrement de bons conseils nutritionnels et vous proposera vraisemblablement une cure de fer. Les médicaments habituels contiennent du « fer métallique » en grande quantité. Il est difficilement absorbé, vous en profitez peu ! L’essentiel reste dans le tube digestif et vos selles deviennent grises… Il « rouille » et l’oxydation locale irrite l’intestin… perturbant les capacités d’absorption du fer !
Des laboratoires de micro-nutrition ont mis au point une armature carbonée de synthèse entourant le fer. Ce complexe moléculaire retrouverait des caractéristiques biologiques voisines du « fer héminique ». Les doses efficaces proposées sont plus modérées et le traitement plus court.
Popeye s’est trompé !
Malgré les efforts de Popeye pour faire la promotion des épinards, vous avez remarqué que ces grandes feuilles vertes sont absentes de la liste des végétaux contenant du fer. L’histoire de cette erreur a été racontée dans le British journal of médecine en 1981. À la fin du XIXème siècle, un chercheur établit la composition de ce légume. Sa secrétaire fait une faute de frappe en tapant la concentration en fer. Elle passe de 30 milligrammes pour 100 grammes à 300 milligrammes pour 100 grammes. L’article scientifique répand une valeur erronée, 10 fois supérieure à la réalité. 30 ans plus tard, des scientifiques allemands rétablissent la vérité ! Trop tard, Popeye a déjà une santé de fer !
Pour ingurgiter plein de fer et obtenir des avant-bras bien musclés, notre célèbre marin aurait mieux fait d’avaler la boite de conserve !
Les aliments riches en Fer …
Classés par ordre décroissant de teneur en fer
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Aliments d’origine animale :
Boudin
Foie, pâté de foie
Pâtés
Huître, moules
Rognons
Kangourou, bison
Autruche, cheval
Viande de bœuf, gibiers
Thon rouge
Œuf
Viande de volaille, lapin
Poissons
Tripes, andouillette, andouille,
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Aliments d’origine végétale
Légumes secs (lentilles, pois, haricots …)
Céréales complètes (pâtes complètes, farine complètes, riz complet…)
Oléagineux (noix, noisettes, amandes, pistaches, olives…)
Légumes, autres féculents,
pain blanc et produits de boulangerie
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Cet article m’a été inspiré par Stéphane CASCUA, médecin et nutritionniste du sport